BARRA island !!! J’y suis après 8 heures de navigation
comme ce devrait toujours être !!! Manquait le soleil mais bon, vent de
travers 20 nœuds, Keikiwai, tout dessus,
filait ses 7 nœuds, par moment, jamais en dessous de 5 noeuds. Pas trop
de houle, ce fût une belle journée. Je suis quand même vanné et me requinque
avec un petit Jura de derrière les fagots et ça le fait mieux que bien… 55
miles en 9h… Pas mal pour mon vieux Keikiwai !!!
Ensuite ventrée de nouilles gratinées et au lit !!! Le
vent forcit sec, c’était prévu mais j’ai pris le risque de partir quand même
(qui écoute trop la météo reste au bistrot !) et je crains que la nuit
soit agitée…
Sur une bouée pas de soucis, dodo comme un loir, l’ours…
Demain sera une journée découverte de cette île du bout du monde… Il y a juste
en face du mouillage trois plages de sable d’un blanc éclatant !!! On se
croirait à Houat !!!
P… de vent de sud-est !!! Ici c’est pire que le
sud-ouest chez nous !!! Ça pleut, ça lève une mer hachée que même les
bigorneaux râlent accrochés sur leurs cailloux !!! Et ça souffle
dur !!! En ce moment 35 nœuds, et ça continue de forcir !! Je l’ai
échappé belle… À une heure près je me
prenais une claque sur le nez au milieu des cailloux de l’île de Barra !!!
Le chenal pas bien large et surtout visibilité réduite à l’avant du
bateau !!! Que je suis bénez sur ma bouée devant le village !! A
terre il y a des campeurs !!! Pleins de campeurs « sauvages ».
Pour l’instant, ils sont tous au pub !!! Ils ont intérêt à se réchauffer avant de rentrer
sous leur igloo de toile !!! Ils vont être bien à tenir les piquets de
leurs tentes !!! Je préfère
Keikiwai, ça bouge un peu mais un peu de chauffage et hop comme à la
maison !!!
Un gros bateau de croisière est en train de rallonger son
mouillage !!! Ça forcit toujours…
Nuit de veille peut être malgré la grosseur de la bouée ?
Non, dodo dans le carré avec réveil toutes les 2 heures pour
vérifier si tout va bien… On appelle ça la plaisance !!!!
La nuit s’est bien passée... Ce matin ballade dans le
village et autour… quelques photos pour vous montrer. Le temps change vite
comme vous pouvez le voir entre la première et la dernière il s’est passé à
peine 2 heures…
main street |
Et pour ceux qui ne croient pas qu’Éole en colère, l’hiver, souffle à plus de 200km/h voilà ce qu’il fait aux éoliennes…
Barra Island fut à la fin du 19ème siècle, comme apparemment toutes les « western isles»,
un des centres de pêche aux harengs les plus importants au monde… Tout le monde
de début mai à fin juin était
« l’esclave » du hareng… Près de 600 bateaux s’adonnaient à cette
pêche. Castelbay (ou je suis au mouillage) capitale de l’île, était réputé pour
sa qualité et son goût incomparable… Tout autour il y avait des
« harengueries » ou les femmes, les anciens et les enfants salaient
et mettaient en baril la pêche des hommes. On compta jusqu’à 40
« harengueries » disséminées autour de la baie…
La population s’accroissant, hôtel, boutiques, nouvelles
maisons d’habitation virent le jour. On construisit même une église : Our
Lady Star of the SEA… et à côté un « abri de marin ».
On réussit même à faire venir le télégraphe en 1884 !!!
A l’heure d’internet que cela paraît désuet !!!
Cela eut un autre impact. Les femmes qui travaillaient par
groupe de trois (crew), malgré la dureté du travail, les mains toujours dans le
sel a vider du poisson, à la fin de la saison, suivaient les pêcheurs dans la
poursuite du hareng. Elle purent ainsi découvrir un autre monde, plus au nord,
et plus au sud vers les côtes est de l’Angleterre (Great Yarmouth ou Lowestoft).
Elles devinrent plus indépendantes et revenaient à Barra Island avec une
nouvelle façon de voir les choses. Cela changea leur mode de vie.
Aujourd’hui, plus une seule conserverie, plus un bateau
harenguiers, même plus un bateau de pêche… Une grande baie qui se souvient avec
nostalgie de son apogée. Son déclin vint dès la première guerre mondiale. Les
hommes envoyés à la mort et les femmes aux usines d’armements, plus personnes ne
faisait tourner cette économie… Un peu de renouveau avant que la seconde guerre
n’arrive… et ensuite plus rien. Le progrès, la pêche au chalut ont eu raison de
cette pêche très saisonnière et artisanale malgré tout.
Une ballade m’emmena, le lendemain, jusqu’à Vatersay Bay. Vatersay est à l’origine
une île que les hommes ont rattaché à Barra Island par un
« causeway » traduisez môle ou brise lame… en fait c’est un mélange
des 2. Il permet d’une part de casser le courant qui passait devant Castelbay,
rendant son accès beaucoup plus difficile que maintenant et d’autre part de
casser les vagues venant du tréfonds de l’atlantique nord lors des grandes
tempêtes hivernales… Malgré cela ça bouge bien quand le vent souffle… même en été. Je n’ose imaginer avant le
« causeway »…!!!
3 heures de marche dans un paysage désolé, de fin du monde.
Quelques moutons paissent tranquillement.
Quelques rares maisons isolées de tout rappellent que l’homme existe et
au détour d’une colline voilà ce qu’on peut y découvrir…
Voilà, maintenant, je suis à bord, les jambes et le dos moulu par la marche que j’aurai cru plus courte !!! Heureusement un bus est passé fort opportunément au moment où mes jambes commençaient à se faire lourdes… L’ours n’est plus un grand marcheur…
Il attend que le coup de vent de SSE prévu vers 22h et galopant toute la nuit…
Maxi 50 nœuds… Je sens que je vais passer encore une nuit de rêve, couché dans
le carré, avec réveil toutes les 2 heures…
Ce soir avant le coup de vent j’irai laver la bête à
l’auberge de jeunesse du coin, ici pas de capitainerie racketteuse, et j’en
profiterais pour essayer de vous envoyer ce que vous lisez maintenant.
La prochaine escale
sera sans doute South Uist, une vingtaine de miles plus au nord. Stornoway
n’est plus qu’ à 80 miles…
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