mardi 2 septembre 2014

DE PENZANCES À DUN LAOGHAIRE


Le vent souffle en furie du fin fond de l’Atlantique, nous sommes dans le carré, vautrés sur les coussins,  dégustant un bon bourgogne après notre premier vrai repas depuis 40 heures…Keikiwai se prélasse frottant ses pare-battage avec contentement contre un quai, baigné par une eau enfin calme.
Atmosphère irréelle….Le hululement  du vent dans les haubans, les gifles de la pluie sur le pont, le claquement des drisses contre les mâts des bateaux qui nous entourent, la musique irlandaise coulant doucement dans la chaleur de notre cocon rassurant, nous repensons à la longue traversée de 40 heures, heureusement au portant d’abord de sud- est pour finir au sud-ouest, dans une mer hachée par les courants luttant contre le vent. 6 heures avec le courant, mer agitée, nous avancions parfois à 9 nœuds .avec 2 ris dans la grand voile,  6 heures après, coup de frein !!! Le courant s’inversant nous nous « trainions » dans une mer anarchique décidée à nous faire payer notre entêtement à vouloir lutter contre les éléments. Et nous avions beau régler les voiles au mieux, changer de cap pour essayer de « prendre » les vagues de manière plus confortable, rien à faire nous n’étions plus qu’une toute petite chose ballotée dans tous les sens, transformée en punching-ball par Neptune !!! Épuisant !!!
Le bateau partait au lof ou s’essayait au surf … Keikiwai ne se sentait plus par moment !!! « Je veux surfer une fois dans ma vie de bateau »,  qu’il nous disait !!! Du calme mon bonhomme !!! Ce genre d’exercice est réservé aux jeunes navires modernes !!!  Tu risquerais de te vautrer lamentablement et te casser quelque chose !
Le premier à le calmer c’est l’équipier de choc, le barreur exemplaire, celui qui inlassablement remet le Keikiwai sur son cap, j’ai nommé POPOL le pilote automatique.  Quelquefois il émettait une petite réserve sous forme d’un grincement quand Keikiwai tentait de s’opposer à sa volonté.  De suite la rébellion était écrasée dans une gerbe d’écume et nous appréciions la performance : « Il est bien ce POPOL ! Bon gars !».

La mer d’Irlande a tenu ses promesses et sa réputation !!!
    

En partant de Penzances nous savions que nous aurions de « l’air », mais il fallait que nous avancions, obligations obligent. Eh oui même les retraités en ont !!!  La mère Théo avait ouvert une petite « fenêtre », mais  a commencé à la fermer quelques heures après notre départ. Imprévisible comme d’habitude.. .
Entre 25 et 40 nœuds dans les grains nous avons, petit à petit, roulis roulant,  couvert les 200 miles qui nous séparaient de notre destination : l’Irlande.

Pas faim, envie de rien d’autre que d’arriver, passant du cockpit à notre couchette, de la veille au sommeil, sans rêve… Un mars et ça repart !!! Heureusement qu’il y a ça et les fruits !! Impossible de faire à manger, ni de faire chauffer un truc chaud. On appelle ça la plaisance !!!
Mais si vous saviez comme c’est bon quand ça s’arrête !!! C’est pour ça qu’on recommence dès que l’on peut, et qu’on en redemande ! Et puis quoiqu’on dise la  mer en colère c’est un spectacle magnifique,
Le gros du coup de vent passe en ce moment et nous trinquons à sa santé, ayant une pensée pour ceux qui l’affrontent…
En arrivant la manille qui retient le palan d’écoute de grand voile a lâché…Heureusement nous affalions… Voilà ce que peut faire le vent…


Tordre une manille forgée en inox de 12mm…




Morphée nous appelle et irrésistiblement. Nous nous sentons attiré vers ses bras accueillants et moelleux… nous ne résistons plus… see you later friends…